Conseil exceptionnel du 21 décembre 2017 – Débat sur les transports et déplacements
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Un conseil de Métropole exceptionnel a été organisé le 21 décembre sur la question des transports et déplacements dans la Métropole Bordelaise.

 

Lors d’un conférence de presse commune qui s’est tenue le 19 décembre, les élu.e.s écologistes du Conseil Régional, du Conseil Départemental et de Bordeaux Métropole se sont réunis afin d’évoquer les mesures à mettre en œuvre à l’échelle du territoire pour améliorer les déplacements du quotidien!

 

Nous vous invitons à lire l’article de la Tribune qui synthétise ces échanges.

 

 

 

Lors du conseil exceptionnel, Pierre Hurmic s’est exprimé au nom du groupe EELV de la Métropole sur la question des mobilités et plus particulièrement de notre participation aux assises de la mobilités, consultation organisée par le gouvernement.

Intervention de Pierre Hurmic lors du conseil du 21 décembre – Contribution aux assises de la mobilité

« Dans le cadre des Assises de la mobilité, consultation des acteurs du territoire devant permettre de préparer une nouvelle loi d’orientation des mobilités au 1er semestre 2018, les collectivités territoriales de notre région sont appelées à se prononcer.

Nous tenons à exprimer notre désaccord avec les priorités qui nous sont présentées.

Bordeaux Métropole entend principalement solliciter l’État afin qu’il s’engage à poursuivre ou lancer des grands projets d’infrastructures routières et ferroviaires, c’est-à-dire :

– la réalisation du grand contournement autoroutier de Bordeaux et,

– la poursuite de la ligne à grande vitesse GPSO au Sud de Bordeaux,

Deux projets d’infrastructures anciens et coûteux et qui ne répondent absolument pas aux besoins quotidiens de nos citoyens.

Ces priorités nous semblent en décalage total avec l’esprit et la finalité assignées aux Assises de la mobilité.

En effet, la Ministre des transports, Mme Élisabeth Borne, aux termes d’un discours qualifié par elle-même de  « discours de rupture avec les politiques de transport du passé » a pris soin de préciser à plusieurs reprises que ces Assises devaient porter sur :

  • « l’optimisation des infrastructures existantes »,
  • « la fin des grands projets pharaoniques trop souvent pas ou mal financés »,
  • « la priorité aux transports du quotidien et aux mobilités du 21ème siècle »,
  • tout en évoquant « un droit à l’expérimentation de solutions innovantes »,

Ajoutant même : « Les citoyens ne nous demandent pas en priorité des TGV ou des autoroutes, mais des solutions pragmatiques pour leurs trajets de tous les jours. »

Ces deux projets précités vont aussi à l’encontre des engagements pris, au début du mois de juillet dernier, par le chef de l’État et par ses deux ministres de la transition écologique et des transports, annonçant la fin des grands travaux d’infrastructures routières et ferroviaires et la priorité nouvelle à donner aux transports du quotidien.

Ils sont enfin incompatibles avec les engagements climatiques internationaux souscrits par notre Pays et par le Plan Climat de notre Métropole.

Faut-il aussi préciser que ces deux projets climaticides ont très peu de chances de voir le jour :

– Le grand contournement autoroutier de l’agglomération, par l’est, cette fois-ci, condamné déjà en 2007, suite aux prescriptions environnementales et climatiques du Grenelle de l’Environnement, n’a pas plus de chances de prospérer que son prédécesseur qui passait par l’Ouest, et pour les mêmes raisons.

En toute hypothèse, il n’est pas une réponse à la thrombose actuelle de la rocade, vue son échéance à 20 ans.

Ne nous isolons pas non plus localement à réclamer avec acharnement cette infrastructure d’un autre âge que le Président du Conseil régional, lui aussi, condamne, en ces termes :

« Une liaison par barreaux autoroutiers des autoroutes existantes n’est pas réaliste. Les deux sont des projets à 10 ans mais le projet autoroutier n’est pas un schéma compatible avec la COP 21. »

Propos de condamnation proches de ceux tenus par le Président Gleyze du conseil départemental de Gironde : « Dérouler du bitume ne changera pas les problèmes de congestion. Il faut changer les comportements ».

Le nouveau Préfet Didier Lallement ne semble pas davantage enthousiaste en déclarant : « Créer un barreau autoroutier mettrait 20 ans, il faut imaginer des solutions à l’échelle de temps de nos concitoyens, pour qu’ils voient des changements concrets. »

Sortons donc par le haut de cet acharnement solitaire en renonçant à cette impasse autoroutière.

– Quant à la LGV GPSO au sud de Bordeaux, cessons aussi cette obstination, même si cette fois -ci, vous êtes sur les mêmes rails que le Président Rousset mais en total désaccord avec le Président Gleyze et les Maires du Sud-Gironde, victimes du tracé, hostiles au projet.

Au moment où la protection de la biodiversité et des milieux naturels est devenue une préoccupation majeure, pensez-vous moderne et judicieux d’artificialiser 4 830 hectares de zones naturelles, de forêts, terres agricoles et viticoles, pour permettre à la SNCF de gagner 30 minutes entre Bordeaux et Hendaye et Bordeaux et Toulouse ?

Le bilan cout-avantage de l’opération ne vous semble-t-il pas déséquilibré, comme le Conseil d’État risque de le juger dans quelques semaines ?

Pourquoi refuser la priorité nouvelle voulue par le gouvernement consistant à préférer désormais aux LGV coûteuses sur les plans financiers et environnementaux et sur lesquelles circulent 10 % de la clientèle ferroviaire, les trains du quotidien que sont les TER qui transportent 90 % de la clientèle de la SNCF ?

Pourquoi, là-aussi, vous acharner alors que des solutions ferroviaires moins couteuses, sur tous les plans, existent ?

Nous regrettons fortement que ces projets soient jugés comme prioritaires et présentés en premier dans cette contribution.

Il nous faut des solutions pragmatiques pour les trajets de tous les jours.

Il faut changer de point de vue et raisonner à partir de l’usager et non plus des infrastructures.

C’est-à-dire passer d’une politique d’équipement à une stratégie des mobilités.

Il n’y pas de solutions miracles mais une multiplicité de solutions réalistes.

A cet égard, certaines propositions formulées, hélas, en deuxième partie de la contribution de Bordeaux métropole requièrent notre assentiment.

– Nous approuvons naturellement la demande faite à l’État , tendant à l’interdiction de circulation des PL de transit sur la rocade aux heures de pointe ou encore le développement de voies dédiées au covoiturage.

Nous formulons, quant à nous, ces propositions depuis 2006 et elles figurent aussi dans une motion adoptée par la CUB en 2013, sans aucune suite.

Que de temps perdu depuis lors !

Ces deux aménagements nécessaires de notre rocade sont aussi réalistes qu’urgents. L’État n’y semble pas du tout hostile.

– Nous sommes favorables à la mise en œuvre de réseaux ferroviaires d’agglomération.

Il nous faut rénover et développer les lignes ferroviaires du quotidien que sont les TER, dont la fréquentation a chuté dans notre région plus qu’ailleurs.

Les responsables du Conseil régional sont obligés d’admettre que le développement de la LGV n’a pas permis l’amélioration des dessertes TER promise, mais a, bien au contraire, impliqué leur détérioration. La fréquentation des TER a chuté de 6% dans notre région. (7 % des déplacements se font en transports en commun en Gironde contre 12 % sur Bordeaux métropole)

– Initier des TER d’agglomération cadencés : Par exemple, Liaison Cenon-Pessac/ Médoc-Pessac Faculté /Langon-Pau / Ambarès-Gare St Jean. Les lignes existent.

Outre les gains de temps, les TER émettent, en moyenne, 20 gr de CO2 au km parcouru par passager transporté, alors qu’une voiture en parcours urbain émet 206 g/km.

Nous ne pouvons donc qu’être d’accord avec vous sur cette priorité, également souhaitée par l’État, mais divergeons totalement avec vous lorsque vous privilégiez la LGV dont le financement considérable a totalement compromis l’entretien, et le maintien de notre réseau de TER.

– Nous souhaitons, nous aussi, la mise en place d’un grand plan national pour le développement du ferroutage.

Rappelons ici que la part du train dans le transport de marchandises est de 40 % en Autriche,  23% en Allemagne , 10 % en France et 2 % dans notre région.

La part du ferroviaire décroît en France alors qu’elle augmente dans les pays européens voisins, en Allemagne et au Royaume Uni, notamment.

Ici, nous avons les sillons, sous utilisés, les équipements, comme Hourcade, et il n’y a pas de raisons que le ferroutage décline.

Le déclin du fret n’est pas inéluctable.

Il nous faut clairement condamner, et vous ne le ferez jamais, la politique ferroviaire de notre pays qui a sacrifié le fret ferroviaire sur l’autel de la grande vitesse pour quelques voyageurs.

– Nous partageons aussi votre souhait de voir l’État inciter au développement du vélo, notamment via le lancement d’un plan national pour le développement et l’usage du vélo.

De l’aveu de la ministre elle-même, le vélo a été le sujet le plus abordé lors des Assises.

Nous souhaitons la réalisation d’autoroutes cyclables, un soutien financier significatif à l’achat de vélos, notamment électriques, une réforme du Code de la route…

Nous insistons sur la nécessité de généraliser l’indemnité kilométrique vélo sur la métropole, en regrettant que notre PDE qui concerne 9 000 agents n’ait pas choisi d’expérimenter cette voie innovante.

Nous savons qu’elle est efficace, elle permet le doublement du nombre de salariés cyclistes et son coût est immédiatement amorti par les retombées, notamment en termes de santé publique, elle entraine une réduction des arrêts maladies de l’ordre de 15 % (Part modale du Vélo : 3 % en Gironde, 7.7 % sur BM).

J’ajouterai brièvement à ces propositions que nous attendons aussi de l’État  :

– la relance de l’écotaxe poids lourds, abandonnée en 2014 au prix d’une invraisemblable gabegie d’argent public et d’un message désastreux lancé aux citoyens

– une incitation forte en direction des collectivités locales en vue de maîtriser la demande de déplacements en les invitant à rééquilibrer les trafics automobiles dans le temps, voire à en diminuer le volume, via l’encouragement au télétravail, aux horaires décalés, au covoiturage, au péage positif, …

Nos collectivités se devraient déjà d’être exemplaires sur ces terrains innovants à travers leurs plans de déplacement des employés (PDE).

– l’impulsion à la création de syndicats mixtes des transports, autorités de régulation des déplacements, impliquant l’ensemble des collectivités territoriales concernées, articulées autour des bassins d’emplois.

Nous attendons aussi une meilleure articulation des politiques menées par la Région, le Département et la Métropole.

Aujourd’hui les trois collectivités proposent trois contributions aux assises de la mobilité, différentes, opposées, incompatibles, parfois.

Il eut été cohérent que soient travaillées ensembles des priorités pouvant être partagées.

Un syndicat mixte des transports nous y aurait aidé.

– Enfin, nous attendons un soutien réel envers les initiatives locales tendant à proposer de nouveaux dispositifs de mobilité innovants.

Et là nous sommes vraiment dans le cadre défini par la Ministre des Transports pour ces Assises de la mobilité.

Il est regrettable que nous soyons passés à côté de cet impératif en cherchant, à tout prix, à prioriser des projets d’un autre âge.

J’ajoute enfin que poursuivre dans nos choix et priorités décalés par rapport au cadrage gouvernemental peut nous priver de la manne de 500 M. d’€ que la Ministre  des Transports envisage de ponctionner sur le Grand Plan d’Investissement 2018-2022 afin de financer des projets innovants

Nous voterons contre cette contribution. »