Monsieur le Président, chers collègues,
Nous tenions avant tout à saluer la qualité de ce document qui avait la tâche aussi complexe que stratégique de tracer le profil des mobilités de notre Métropole pour les vingt prochaines années. Les choix de desserte comme Gradignan Talence Bordeaux Cenon sont astucieux, les liaisons Pont à Pont ou celle dénommée Bassens Campus aussi.
Si nous souscrivons à la plupart des propositions développées dans ce rapport nous suggérons qu’il soit assorti d’un plan d’action explicite, avec un tableau de bord d’exécution avec les objectifs poursuivis et de relever le niveau d’exigence de certains des indicateurs de suivi.
Concernant le réseau de transports en commun, la mise en œuvre de la ligne D ne doit pas nous empêcher de réfléchir aux économies à réaliser tout en conservant la qualité du réseau.
Sur la question centrale du développement de la vitesse commerciale de nos réseaux de transports en commun et notamment du réseau tramway nous prenons acte de notre proposition concrète : la réalisation d’une étude à même d’identifier les freins et les pistes d’actions nous permettant d’approcher les 20 km/h de vitesse commerciale. Plus nous tarderons à nous y pencher, plus la vitesse globale se dégradera et plus il sera difficile d’atteindre nos objectifs de report modal. Nous devons envisager toutes les pistes, y compris la fermeture de certaines stations.
Concernant le réseau de bus, je rappelle notre soutien au BHNS (pas trambus) sur la desserte de Saint-Médard – Saint-Aubin, ce projet est prioritaire. Quant à la desserte par le tramway en prolongement de Cantinolle, une étude sérieuse permettrait d’alimenter la réflexion plutôt que des querelles picrocholines. Toujours sur le réseau de bus, souvent les dessertes transversales sont mentionnées comme le chaînon manquant de notre réseau, nous devons faire un effort particulier sur les lignes existantes : la 9 sur les Boulevards ou la 35 entre Eysines et le campus doivent ainsi faire l’objet d’améliorations notoires.
Concernant l’usage de l’automobile, le rapport demeure encore empreint de la croyance bien ancrée de la politique du tuyau additionnel et de la fluidité :
- Le rapport préconise ainsi de poursuivre les études sur une possible utilisation de la bande d’arrêt d’urgence de la rocade par les transports en commun. Mais nulle mention des véhicules en covoiturage et encore moins d’une utilisation dédiée de la 3ème voie en cours de travaux. Le profil de la rocade qui se dessine est donc le suivant : une 2×4 voies avec éventuellement une BAU dédiée ! Tout ceci témoigne d’un volontarisme politique bien trop mesuré.
Je prends pour exemple la phrase introduisant le sujet page 18 : « le projet d’augmentation de la capacité de la rocade ne peut-être un encouragement à utiliser la voiture ». Ne rêvons pas, la voiture « c’est le loup contemporain» de notre espace urbain, sans contrainte elle accroit son espace. Nous avons encore une conception trop libérale de la mobilité.
- Parallèlement nous réitérons notre demande de restreindre la circulation des poids lourds sur la rocade aux heures de pointe.
- En matière de stationnement, le document est contradictoire. Alors qu’il est dit en page 19 que « l’espace libéré sur la voirie métropolitaine doit permettre de développer les aménagements consacrés aux modes actifs (bandes cyclables, aménagements piétons)», la Métropole se refuse encore à prendre à sa charge la compétence en matière de stationnement sur voirie, la laissant à la maîtrise des communes. Notre Métropole se prive ainsi d’un levier d’action stratégique car l’accroissement du report modal de la voiture individuelle vers les transports en commun passera inévitablement par une politique coordonnée de réduction de l’offre de stationnement au cœur de l’agglomération. Nantes est souvent cité en exemple. Or le développement des lignes Chronobus à Nantes s’est accompagné de la suppression de 1 000 places de stationnement, pour des résultats extrêmement encourageants. Il faudra donc prendre le taureau par les cornes Monsieur le Président si on veut être à la hauteur.
Concernant les modes actifs
Si l’objectif d’une part modale du vélo de 15 % sur l’ensemble de la Métropole est rappelé et si certaines orientations évoquées nous satisfont tout en devant être précisées (création de vélo-rue, circulation sur le Pont de Pierre), nous regrettons qu’un réel déséquilibre se dessine entre les actions prévues pour la ville centre et celles prévues pour les autres communes. Les franchissements de la rocade sont ainsi relégués à un avenir incertain puisque dépendant du coût des travaux de la rocade et les ruptures de pistes cyclables entre Bordeaux et les communes limitrophes ne sont pas évoquées.
Nous nous étonnons également de la disparition du Réseau Vélo Express pensé lors de la précédente mandature, de l’absence d’objectifs chiffrés de création de kilomètres de pistes cyclables ou de renforcement des stationnements sécurisés. Espérons que la refonte annoncée du Plan Vélo permettra d’éclaircir ces points et de changer de braquet.
Il y a des partis pris qu’il faut prendre en faveur des vélos et des piétons : un Pont de Pierre réservé aux véhicules d’urgences, TC piéton vélo ou bien encore la Place Gambetta ou les 7 millions d’€ de travaux laisseront malgré tout les voitures en surface alors qu’on pourrait imaginer un espace de mobilité douce avec une attractivité sans égale.
En ce qui concerne la gouvernance, nous encourageons bien sûr la concrétisation d’un syndicat mixte de transports en commun regroupant les différentes Autorités Organisatrices des Transports et en ce sens souhaitons enrichir la réflexion sur le renforcement du réseau interurbain par une proposition concrète : la création de lignes d’autocar Express reliant l’agglomération aux territoires périphériques, dotées d’une amplitude horaire suffisante pour s’adapter aux temps de travail et de loisir de ses utilisateurs (départs et retours tardifs). Sur le lien avec les TER et la Région, la ceinture ferroviaire et la réouverture de la Médoquine ainsi que la revitalisation de l’étoile ferroviaire constituent des enjeux capitaux. Pour autant, je tire la sonnette d’alarme sur la dégradation de la ligne de Verdon qui a un impact notoire sur notre réseau, en effet nous ne devons plus accepter que cette ligne soit le parent pauvre du TER car c’est autant de voyageurs découragés qui utilisent leur voiture au final vers la Métropole.
Enfin, il nous semble aussi utile de poursuivre les réflexions amorcées lors du Grenelle des mobilités de la Métropole autour de la gestion des temps. Alors que notre Métropole va poursuivre sa croissance, une bonne connaissance des pratiques temporelles de notre territoire et la prise en compte de ses rythmes urbains serait pourtant nécessaire. La création d’une Agence des temps à même d’analyser ces dynamiques et de proposer des pistes concrètes en matière d’harmonisation des heures d’embauche des salariés, de développement du télétravail ou du coworking ou des créneaux de logistique et de livraison du secteur privé nous apparait comme une orientation intéressante pour notre Métropole.
Compte tenu de ces remarques, nous nous abstiendrons sur ce dossier.