Plan local d’urbanisme 3.1 : notre contribution à l’enquête publique
Partager

Enquête publique PLU

Contribution du groupe Europe Ecologie Les Verts de Bordeaux Métropole

Sans nous appesantir sur la philosophie initiale de ce PLU, il est cependant utile de rappeler qu’il s’agit d’un PLU 3.1, issu du Grenelle 2, avec des objectifs initiaux on ne peut plus louables, entre autres :

  • Maintenir une enveloppe urbaine constante
  • Préserver et renforcer les espaces naturels et agricoles,
  • Mieux structurer l’urbanisme et la mobilité,
  • Aboutir à un document souple qui soit un tremplin pour l’innovation et la négociation.

Au regard de ces objectifs, les améliorations apportées au PLU précédent sont significatives, sans toutefois être particulièrement innovantes ou ambitieuses, ce qui au regard des enjeux importants sur notre territoire en matière de lutte contre l’étalement urbain et de transition énergétique ne permettra sans doute pas de relever ces défis.

Après avoir parcouru ce PLU, nos constats sont donc les suivants :

1/ Concernant la destination des sols : un rythme de consommation freiné mais une pression urbaine insuffisamment contenue

Si nous réduisons de moitié le rythme de consommation des sols avec ce projet de PLU, toutefois, d’ici à 2030, 4,4% du territoire seront consommés, soit 2152 hectares.

Certes, l’augmentation de la population étant estimé à 32%, ce chiffre peut paraître faible et très en deçà du rythme observé entre 2006 et 2013, mais il n’en demeure pas moins que notre territoire verra son artificialisation augmenter de 11%.

Nous faisons par ailleurs le constat d’un manque d’ambition concernant la réservation de surfaces agricoles pour permettre le développement d’une agriculture péri urbaine.

Ainsi, à titre d’exemple, aucune nouvelle zone pour le maraichage ou pour de l’élevage n’est prévue sur la commune de Saint-Médard-en-Jalles, malgré le fait que de nombreuses parcelles sont idéales pour ce type d’activité dans les secteurs des Jalles, de Corbiac, Gajec, Issac, Cérillan et Maguda. Ces parcelles passent souvent en zones urbaines ou économiques.

Sur certains secteurs soumis à de fortes pressions d’urbanisation, il est regrettable que le projet de PLU prévoit la suppression de zones naturelles :

  • A Saint Médard en Jalles, nous dénonçons les nouveaux projets d’urbanisation pour des zones économiques, au sud et est du secteur de Magudas qui détruira des hectares de zones jusqu’à présent classées en zones naturelles ou à urbaniser à long terme (Ce terme d’ailleurs disparait et toutes les zones 2AU passent en AU et les surfaces impactées progressent significativement).
  • La dernière grande zone humide de la ville de Bordeaux, « la Jallère », n’est pas sanctuarisée dans ce PLU. Nous dénonçons le nouveau projet d’urbanisation d’un secteur qui détruira 9,1 hectares de zones humides dont 5,3 ha sur l’ilot actuellement occupé par Groupama/gan, ilot qui est, de plus, cartographié en zones d’aléa fort et donc globalement inconstructible, dans le cadre de la révision du Plan de prévention des risques d’inondation (PPRI). Nous ne comprenons donc pas le nouveau zonage défini dans le PLU qui autorise la construction de logements (zonage UM13) sur un périmètre associé à une zone rouge du PPRI, donc a priori inconstructible.

Nous réitérons par ailleurs notre désapprobation concernant le projet d’aménagement de la zone UP 50 Villenave d’Ornon – Genest, qui prévoit l’aménagement (terrassement) de 81 % de la superficie du site, soit 27,1501 ha sur 33,4489 ha, et l’imperméabilisation de 74 % de la superficie aménagée (soit 20,117 ha sur 27,150) dans une zone de grande qualité paysagère, à proximité de la Garonne et de sa richesse écologique (zone Natura 2000).

De même, nous exprimons de fortes réserves sur la zone de projet UP 29 Lormont Cascades, secteur présentant un intérêt paysager certain, secteur également concerné par un périmètre d’inventaire ZNIEFF sur 6,6 hectares et soumis au risque inondation.

2/ Concernant la densité : une ambition timorée

Si un effort significatif a été mené sur les axes structurants de transports en commun, il nous semble toutefois que l’ambition demeure encore bien timorée, et de manière générale la torpeur de la hauteur demeure bien présente dans les communes.

Ainsi, sur de nombreux axes structurants, la hauteur maximale admise aurait pu être bien souvent relevée d’un ou deux étages sans grande difficulté, à l’image de l’avenue de Saint Médard à Mérignac qui reste à une hauteur plafond de R+2 dans ce projet de PLU malgré le fait qu’un projet de Bus à Haut Niveau de service (BHNS) est acté par la métropole sur cet axe.

3/ En matière de logement : des engagements inégaux selon les communes

L’augmentation des servitudes de mixité sociale et des secteurs de diversité sociale est une satisfaction. Cela permettra de renforcer le logement locatif social là où c’est nécessaire et pertinent, ou au contraire de le limiter dans un souci de rééquilibrage, et de favoriser l’accession sociale, la diversité sociale ou le logement abordable.

De même, nous approuvons le maintien de la définition de STL, secteurs de taille de logement, dans ce PLU pour inciter à la construction de logements familiaux (T3 ou plus).

Toutefois nous notons avec regret que toutes les communes ne manifestent pas le même volontarisme en la matière, à l’image de Talence, commune fortement marquée par du logement de petite taille, qui s’engage dans ses secteurs de STL à produire 40% de T3 ou plus quand Mérignac s’engage dans ses secteurs à hauteur de 70% et Eysines à hauteur de 100%.

Les objectifs affichés en matière de production de logement social sont, pour certaines communes déjà déficitaires, insuffisants pour leur permettre de respecter le seuil légal des 25%. Il en est ainsi de Saint-Médard-en-Jalles qui, avec un objectif de production de 2OO logements par an, dont 90 en logements sociaux, 40 en accession sociale et 70 logements privés, ne pourra pas atteindre les 25%. Idem pour la ville de Bordeaux qui devrait faire preuve d’un volontarisme plus marqué pour rattraper son retard en la matière (l’objectif de 33% de logements locatifs conventionnés est insuffisant).

4/ En matière de stationnement : des évolutions positives

L’inscription de secteurs de modération du nombre de places de stationnement le long des axes de transport en commun et autour des pôles d’échanges est un élément positif, de même que les modalités qualitatives en matière de stationnement vélo, plus précises dans ce PLU que dans le précédent.

5/ Concernant la nature en ville : peu d’évolutions véritablement significatives

La révision générale du PLU 3,1 de Bordeaux Métropole ambitionne de maintenir une enveloppe urbaine constante, de préserver et renforcer les espaces naturels et agricoles et « à repenser le territoire par la nature et le paysage en faisant pénétrer la nature dans la ville ».

Si le projet est louable, il constitue néanmoins un véritable défi face au projet de métropole millionnaire et au phénomène de métropolisation.

Nous partageons l’idée qu’il est indispensable de repenser le territoire par la nature et le paysage. Dès lors, il est nécessaire de renforcer le lien entre nature et urbanisation pour créer une ville de proximité équitable, viable et vivable.

Les propositions de ce nouveau PLU3.1 n’ont pas rétabli cet équilibre indispensable pour la métropole et nous paraissent insuffisantes face à ces enjeux.

Parmi les points positifs, nous relevons la mise en œuvre de protections pour les « terrains cultivés en zone urbaine »  et la possibilité de développer des jardins familiaux dans certaines zones naturelles ou espaces naturels de loisirs.

Mais parallèlement, sous couvert de « nettoyer le PLU », le projet qui nous est présenté avalise et de fait légalise des situations de constructions et d’imperméabilisation sur de nombreux Espaces Boisés Actuels (EBC) actuels, situations restées sans sanction, effaçant ainsi ces situations anormales. C’est le cas notamment sur la commune de Talence.

Les espaces boisés classés (EBC), outre de maintenir une certaine biodiversité dans la ville, concourent à réduire la pollution de l’air et les ilots de chaleur, et permettent d’offrir un espace de respiration, d’apaisement, de rencontre et de convivialité au sein d’une urbanisation dense.

Nous attirons votre vigilance sur l’évolution des EBC qui sont déclassés en espace paysager à protéger (EPP), alors que ce classement en EPP permet de s’affranchir des contraintes règlementaires qui protègent efficacement les zones boisées.

Par ailleurs, la mise en place d’un coefficient de végétalisation est une innovation intéressante. Toutefois, elle n’est appliquée que ponctuellement, en fonction du contexte, et comme indiqué dans le document (et cela veut tout dire) en fonction de l’état d’avancement des réflexions… Sur Bordeaux, ce coefficient sera ainsi appliqué uniquement sur le secteur de Claveau et sur l’OIN Euratlantique. Nous le regrettons car en matière de lutte contre les îlots de chaleur, il y avait là un levier intéressant qui aurait pu être généralisé.

6/ Concernant le volet énergétique : une ambition très insuffisante

Cet aspect est traité essentiellement dans le document sous l’angle de la mobilité. Nous n’y retrouvons pas une ambition significative en matière d’efficacité énergétique et de développement des EnR dans le bâti.

Certes, des dispositions visant à ne pas pénaliser les initiatives d’isolation par l’extérieur par exemple sont prévues dans le règlement. Mais finalement, ce dernier comporte assez peu de dispositions opérationnelles dans le domaine énergétique, en dehors de préconisations générales. Rien par exemple pour inciter voire contraindre au développement des EnR, alors qu’on aurait tout à fait pu imaginer que dans les constructions individuelles d’une certaine taille, sur des grandes parcelles, l’installation de panneaux solaires soit obligatoire ou bénéficie d’un bonus. Des villes ont instauré ce type de dispositions, par exemple en Suisse à Lausanne.

Si l’on voulait pousser un peu le bouchon, nous avons un peu le sentiment que le règlement du PLU facilite finalement plus la création de piscines que l’installation de dispositifs individuels de production d’énergies renouvelables.

7/ Concernant le volet mobilité : des ambitions fortes qui ont peu de déclinaisons opérationnelles dans ce PLU

Il est à noter que les déplacements et la mobilité constituent la thématique principale du bilan de la concertation avec 29,5% des contributions, devant l’habitat et l’urbanisme (25%). C’est donc une préoccupation majeure de nos concitoyens.

Nous notons avec regret l’absence de réserves foncières sur des projets structurants pour le développement des transports en communs dans notre agglomération :

  • Pas de réserve foncière pour l’aménagement d’un pôle d’échange multimodal pour la gare de la Médoquine , son emprise ayant été réduite lors de la 5éme modification du PLU .
  • de même, nous constatons que des emplacements réservés de voirie et d’équipement pour insérer les futurs corridors de transports en commun, tel le tracé du futur TCSP desservant Bordeaux, Talence pour rejoindre ensuite Gradignan, ne sont pas inscrits dans ce PLU3.1.

Nous avons lu avec attention le programme d’orientations et d’actions Mobilité qui constitue le pilier PDU de ce PLU 3 en 1. Il s’agit d’un document fort instructif et très ambitieux, qui conditionne une grande partie de l’évaluation environnementale positive du projet de PLU qui nous est proposé.

Les propositions d’actions y sont nombreuses et nous y souscrivons largement. Nous relevons ainsi notamment plusieurs mesures suggérées ou portées par notre groupe depuis plusieurs années, tels que la mise en place de contrats d’axe, l’élaboration de plans de desserte écomobile dans les polarités commerciales, un plan piéton métropolitain,un plan poids lourds avec notamment la limitation de leur circulation aux heures de pointe, une étude des opportunités de tarification de la mobilité parmi lesquelles celle d’un contrôle d’accès urbain, la mise en œuvre d’un réseau de transports en commun de l’aire métropolitaine avec une billettique unique et une gouvernance partagée, etc.

A l’exception de quelques rares mesures qui, cela ne vous surprendra pas, ne recueillent pas notre enthousiasme (la LGV principalement, classé non sans humour dans la partie 4/ « mettre le développement durable au centre du projet de mobilité »), l’ensemble du POA Mobilité est donc particulièrement prometteur.

Seulement voilà, bon nombre des actions projetées ne sont pour l’heure qu’au stade des promesses et leur financement n’est pas assuré (cf. réactualisation du Plan Vélo et mise en œuvre du REV – Réseau Vélo Express », création d’une centrale de la mobilité et d’une agence des temps, etc.).

Dans ce contexte, le POA Mobilité n’apparaît pas de nature à atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre. De l’aveu même de l’évaluation environnementale, les émissions attendues de CO² en 2050 seraient encore 2 fois supérieures aux objectifs visés.

Par ailleurs, le POA Mobilité mise à notre sens beaucoup trop sur le progrès technologique hypothétique des véhicules, quand il devrait reposer sur des actions concrètes à l’impact déjà éprouvé ailleurs, tel les infrastructures permettant le développement des modes doux.

En complément de nos remarques exposées ci-dessus, voici nos propositions pour amender positivement ce PLU :

Donner toute sa place à la nature

  • Créer des jardins publics ou squares, prioritairement dans les quartiers qui en sont dépourvus : nous demandons que soit envisagée l’utilisation des ER (emplacement réservé) et des servitudes de localisation d’espaces verts (au titre de l’application de l’article L.123-2C) qui président à la création d’emplacements réservés et de servitude de la localisation pour la création de parcs et jardins.
  • Renforcer les outils incitant à la végétalisation:
  • Systématiser un coefficient de biotope adapté en fonction des zones (cf. PLU de Paris et de Montreuil)
  • Instaurer un coefficient de pondération permettant de prendre en compte la qualité environnementale des réalisations végétales dans le calcul du ratio des surfaces végétalisées (cf. PLU de Grenoble)
  • Inscrire que l’on privilégiera les espèces végétales endogènes, dépolluantes sur les axes fortement soumis à la pollution atmosphérique, et non allergènes.
  • Permettre une hauteur maximale augmentée pour les constructions avec toitures végétales (cf. PLU d’Orléans)
  • « Instaurer une obligation de végétaliser majoritairement les aires de stationnement »: Nous proposons de remplacer « majoritairement » par « systématiquement » dans le texte.
  • Utiliser les outils de classement des parcelles : La protection des secteurs paysagers par le classement des parcelles en zone de protection du patrimoine paysager ne sont pas suffisantes pour protéger des parcelles de l’urbanisation. Le classement EBC est indispensable « pour respecter l’équilibre bâti/espace naturel et ainsi donner des espaces de respiration dans les tissus urbains denses pour protéger des boisements présentant un intérêt particulier pour la rue, le quartier… ” Les EBC restent les outils les plus forts pour la protection d’un secteur.
  • Sanctuariser les dernières zones humides de notre territoire fortement soumises à la pression urbaine (cf. « la Jallère » par exemple)

Affirmer une ambition plus forte en termes de logement

  • Augmenter les pourcentages cibles de grands logements dans les secteurs du STL (secteur de Taille de logement), particulièrement dans les communes concernées par du logement de petite taille.
  • Affirmer un engagement plus important en matière de servitude de mixité sociale (SMS) en particulier sur des secteurs connus pour être de futurs sites de projets, connectés au réseau de transports en commun, par exemple dans la zone de l’Espace Médoquine cours Gallieni à Talence.
  • Affirmer un engagement plus important en matière de hauteur maximale admise sur les axes structurants de transports en commun

Utiliser tous les leviers disponibles pour faciliter la transition énergétique

En s’appuyant sur la loi pour la transition énergétique, le PLU permet de définir des secteurs dans lesquels il est imposé de respecter des performances énergétiques et environnementales. Il peut ainsi imposer une production minimale d’ENR.

Il est regrettable que le nouveau PLU3.1 affiche une ambition insuffisante sur le volet énergie climat, aucune disposition opérationnelle dans le domaine énergétique, en dehors de préconisations générales et des réseaux de chaleur.

Nous proposons les dispositions suivantes :

  • Pour les opérations individuelles d’une certaine taille, sur des grandes parcelles, l’instauration de panneaux solaires doit être obligatoire ou bénéficiaire d’un bonus (cf. Lausanne).
  • Une majoration du coefficient d’occupation des sols devrait être systématisée pour les constructions qui se dotent de dispositifs de production d’énergie renouvelable (cf. PLU de Lille).
  • Les éléments et locaux techniques liés à la production d’énergie renouvelables doivent pouvoir être admis en dépassement des hauteurs maximales (cf. PLU d’Orléans).
  • Par ailleurs, dans certains secteurs de protections patrimoniales (quartiers d’échoppes par exemple), la règlementation rendant impossible la pose de panneaux photovoltaïque, nous demandons que cette règle qui n’autorise pas l’installation de panneaux sur le coté rue soit supprimée afin de favoriser le développement des ENR.
  • Enfin, à l’occasion de grandes opérations de densification et de modification de voirie, il serait souhaitable de prévoir des espaces réservés pour des réseaux de chaleur (Quartier de Thouars à Talence par exemple).

Au regard de l’ensemble de ces observations, notre avis est donc réservé sur ce projet de PLU dans la mesure où ses dispositions ne nous semblent pas contenir une ambition suffisante pour répondre à l’urgence climatique notamment.

Nous demandons donc à la commission d’enquête de tenir compte de nos remarques afin que le nouveau PLU s’inscrive dans les objectifs qui lui ont été assignés.